Posted on 13/09/2024
Cela arrive tellement souvent que c’est devenu banal. Des infrastructures qui ne sont plus à niveau et qui brisent alors qu’on n’a plus d’argent pour les réparer.
Cette semaine, c’est la ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry, qui se désolait qu’on « ne peut pas tout faire en même temps » et qui a donc averti les cégeps du Québec qu’ils devront réduire leurs budgets d’investissement, de moitié dans certains cas.
À tel point qu’au cégep du Vieux Montréal, on a donné la directive de ne pas remplacer les toilettes qui brisent. Voilà pour l’aspect spectaculaire.
Le problème, c’est que tous les besoins d’infrastructure deviennent de plus en plus criants. Et qu’un déficit d’entretien, c’est inévitablement le début d’un cercle vicieux qui est le contraire de la bonne gouvernance. Ne serait-ce que parce que tout ce qui est reporté va inévitablement coûter plus cher, bien souvent avec de l’argent qu’il faudra emprunter.
Les cégeps ne sont, hélas, que la pointe de l’iceberg. Les écoles primaires et secondaires, les hôpitaux, les CHSLD, sans parler des routes et des conduites d’eau, sont en piteux état au Québec.
Quand on est malchanceux, le déficit d’entretien finit par des tragédies comme l’écrasement du viaduc de la Concorde, des paralumes qui tombent sur l’autoroute Ville-Marie ou un incendie mortel dans une résidence pour personnes âgées qui n’a pas de gicleurs.
D’autres fois, c’est simplement des réparations urgentes qui doivent être remises à plus tard. Ou l’ajout d’infrastructures pourtant devenues essentielles, comme la construction d’une nouvelle aile ou d’une bibliothèque. Ou encore la mise à niveau des salles d’opération dans les hôpitaux ou des infirmeries dans les résidences pour personnes âgées. Souvent avec de coûteuses nouvelles technologies.
Mais dans la vie de tous les jours, les gouvernements ont presque toujours l’option de « pelleter en avant ».
On connaît la méthode. Quand le déficit devient trop grand – et il était de 11 milliards au dernier budget, un record –, le ministre des Finances va au plus facile : il fait des coupes dans les budgets d’entretien, quitte à promettre au ministre concerné que, l’an prochain, il verra son budget augmenter. Ce qui n’arrive pas souvent…
En même temps, il faut toujours de l’argent pour de nouveaux projets. Que ce soit le troisième lien ou un Stade olympique capable d’accueillir les concerts de Taylor Swift. Encore une fois, le budget d’entretien des autres infrastructures devient la source d’argent frais la plus facile.
Le résultat, c’est une crise dissimulée des finances publiques, une crise quasi permanente que « découvrira » le prochain ministre des Finances en jurant qu’il ne pouvait pas savoir à quel point la situation était dramatique avant d’arriver au pouvoir.
Dans le cas du gouvernement de la CAQ, la situation est aggravée par des baisses d’impôt qui, avec le recul, deviennent difficiles à justifier.
Ainsi, le budget de 2023, voulant respecter les promesses de la dernière campagne électorale, contenait des baisses d’impôt de près de 4 milliards.
« La baisse d’impôt va accroître la prospérité du Québec en stimulant la croissance économique ainsi que l’offre de travail. Les ajustements entrés en vigueur tout récemment concrétisent l’engagement de notre gouvernement d’améliorer le revenu disponible des Québécois de façon récurrente », disait alors le ministre des Finances, Eric Girard.
Mais les baisses d’impôt ne sont, malheureusement, qu’une partie des promesses inconsidérées du gouvernement Legault.
Encore cette semaine, le ministre démissionnaire de l’Économie et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, rappelait combien il en coûtera pour décarboner le Québec et avertissait qu’il faudra des augmentations importantes des tarifs d’électricité. Réponse du premier ministre François Legault : surtout pas ! En tout cas, aussi longtemps qu’il sera premier ministre.
Il y a d’autres promesses électorales de la CAQ qui ont été présentées comme des solutions à des problèmes importants, mais qui ne pourront devenir des solutions à long terme par manque d’argent. On pense ici aux trop coûteuses maisons des aînés, au Lab-école ou aux maternelles 4 ans.
Les maisons des aînés sont un bon exemple : le tiers des 33 maisons promises pour 2023 par le gouvernement Legault n’ont pas été livrées et presque toutes les autres ont des chambres vides.
De beaux projets, populaires en campagne électorale, mais qui doivent aujourd’hui être ajoutés à la liste des promesses abandonnées ou dont l’envergure devra être considérablement réduite. Autant d’icebergs pour les finances publiques.