Posted on 13/09/2024
Réfection de blocs sanitaires, réparation de la plomberie et du système de chauffage, remplacement de la toiture… Des dizaines et des dizaines de travaux prévus cette année dans les cégeps et les universités sont mis en veilleuse en raison des nouvelles restrictions budgétaires imposées par Québec, a appris La Presse.
« Les cégeps sont à l’heure des choix », illustre la directrice générale du cégep de Saint-Félicien, Sylvie Prescott.
L’établissement projetait de réaliser des travaux totalisant plus de 5 millions de dollars au cours de l’année. Or, le ministère de l’Enseignement supérieur lui a imposé un plafond budgétaire de 900 000 $, dans le cadre d’une nouvelle directive forçant tous les cégeps et toutes les universités de la province à réduire leur budget d’investissement.
Conséquence, le cégep doit suspendre la plupart de ses projets de rénovation pour une période indéterminée. « On parle de réfection de salles de classe, de blocs sanitaires, d’insonorisation des gymnases », énumère Mme Prescott.
Au cégep de Chicoutimi, c’est la réfection de la cafétéria qui est suspendue. Et au collège d’Alma, celle du centre de documentation.
Au cégep de Jonquière, la plomberie de la résidence étudiante devait être entièrement refaite cette année. Là aussi, les travaux ont été reportés.
Nos installations sont désuètes. On doit procéder à ces remplacements-là, mais on est vraiment contraints.
- Sylvie Prescott, directrice générale du cégep de Saint-Félicien
Le Cégep de Lévis avait déjà planifié son budget annuel et déterminé ses priorités lorsque la directive ministérielle annonçant des coupes a été transmise en juillet, un mois après le début de l’exercice financier.
Seulement pour honorer ses engagements, l’établissement estime avoir un manque à gagner de 1,6 million de dollars.
Parmi les chantiers qu’il devait lancer cette année et qui seront finalement reportés : le remplacement du système de chauffage et de certaines parties de la toiture du bâtiment principal.
« Chaque année, on fait déjà des choix qui font mal. Nous souhaitons pouvoir utiliser le budget que nous avait accordé le Ministère afin de réaliser adéquatement notre mission », souligne la porte-parole du cégep de Lévis, Catherine Guay.
L’achat d’équipement pédagogique est aussi touché par les nouvelles restrictions budgétaires.
Des établissements ont affirmé à La Presse avoir dû repousser l’achat de mannequins de simulation et de respirateurs de transport pour des programmes en santé ou encore de robots pour des programmes de génie.
« On a plein de questions »
« Je suis très, très préoccupé », dit d’emblée le recteur de l’Université de Sherbrooke, Pierre Cossette.
L’établissement avait prévu réaliser pour 36 millions de dollars de travaux au cours de l’année. Or, Québec lui a fixé un plafond budgétaire de 7 millions de dollars en 2024-2025. Ce dernier tombe ensuite à 3,8 millions en 2025-2026 et 4,2 millions en 2026-2027.
« Les appels d’offres étaient tous faits avant le 31 juillet [date où la directive a été transmise à tous les établissements]. Au moment de recevoir la lettre, on avait plus de 20 millions de dépenses engagées », indique M. Cossette.
En mêlée de presse jeudi matin, la ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry, a assuré que les projets déjà en chantier pourraient se poursuivre.
« Il y a des ententes qui ont été faites. On va honorer ces ententes-là », a-t-elle déclaré, ajoutant qu’elle avait rencontré les directions des cégeps et des universités et qu’elles étaient « conscientes de tout ça ».
« On n’a pas eu cette confirmation », affirme cependant M. Cossette.
On a plein de questions et on a besoin de réponses cohérentes, parce que c’est très préoccupant, cette façon de gérer là.
- Pierre Cossette, recteur de l’Université de Sherbrooke
Comme plusieurs établissements d’enseignement supérieur, l’Université de Sherbrooke fait face à une hausse de son effectif scolaire, qui continuera d’augmenter dans les prochaines années avec le boom démographique.
« Un heureux problème », souligne son recteur, à condition d’avoir l’espace pour les accueillir. Or, les restrictions budgétaires menacent les projets visant à augmenter la capacité d’accueil de l’établissement.
Par exemple : la transformation de locaux administratifs en salles de classe pour les étudiants en médecine. « On devait partir en appels d’offres à la fin de l’année », indique Pierre Cossette, qui craint que le projet ne se réalise pas – du moins à court terme.
« On ne peut pas tout faire en même temps »
« Tous les projets arrivent en même temps. À un moment donné, il faut prioriser certains projets », s’est défendue Pascale Déry.
Bien qu’elle ait reconnu les besoins « colossaux » des réseaux d’enseignement supérieur, en particulier du réseau collégial.
« On ne peut pas tout faire en même temps », a-t-elle fait valoir.
Il va falloir qu’on encadre un peu les investissements de manière annualisée pour suivre l’évolution des projets, parce qu’il y a des coûts qui explosent aussi.
- Pascale Déry, ministre de l’Enseignement supérieur
Les montants prévus au Plan québécois des infrastructures pour les réseaux collégial et universitaire « n’ont jamais été aussi élevés », a-t-elle rappelé.
Une rencontre est prévue la semaine prochaine entre les directeurs des 48 cégeps et le ministère de l’Enseignement supérieur.
Quelques exemples de travaux suspendus à la suite de l’annonce sur les restrictions budgétaires :
Cégep de Rosemont
Remplacement de différents systèmes de chauffage et de ventilation en fin de vie utile, rénovation des gymnases, réfection des façades
Cégep de Lévis
Remplacement du système de chauffage, remplacement de certaines parties de la toiture et isolation du bâtiment principal, réfection de la toiture de deux résidences étudiantes, mise aux normes du système d’alarme incendie
Université Concordia
Réfection de façades de bâtiments, rénovation intérieure des annexes, travaux de toiture
HEC Montréal
Travaux de plomberie et recouvrement de sol